Monter, se faire monter ou se battre… tel est le dilemme des mâles ténébrions olifant
Les comportements homoérotiques (SSB pour Same-sex behavior en anglais, ou homosexualité par anthropomorphisme) sont incroyablement communs dans tout le règne animal, mais tous les animaux ne le pratiquent pas pour les mêmes raisons.
Par exemple, les femelles bonobos se livrent à toutes sortes de SSB avec une étonnante fréquence, jusqu’à une fois toutes les deux heures, mais les primatologues précisent qu’ils ne le font pas simplement pour le plaisir. Les bonobos ont une activité sexuelle accrue quand ils sont stressés ou que les liens sociaux sont tendus, ce qui suggère qu’ils utilisent ces comportements comme un moyen de maintenir la paix. Et les experts du comportement canin estiment que les chiens des deux sexes peuvent se monter parce qu’ils sentent que leur place dans la hiérarchie est menacée.
Des chercheurs de l’université d’Exeter (Angleterre) ont trouvé que le SSB des coléoptères mâles, ténébrions olifant (Gnatocerus cornutus, en image d’entête et qui sous forme de larves sont appelés vers de farine), peut être entrainé par une combinaison de ces motivations.
Les mâles G.cornutus ont de grandes mâchoires qu’ils utilisent pour mordre, pousser et retourner leurs adversaires lors de combats. Après la bataille, le perdant se retire généralement pour récupérer, tandis que le vainqueur continue à trouver et à s’accoupler avec les femelles à proximité.
Le comportement homoérotique de ces coléoptères se traduit par le fait qu’un mâle monte un autre mâle et tambourine sur sa coquille (ce qu’ils font aussi lors de l’accouplement avec des femelles). Les scientifiques soupçonnaient que les deux activités servaient le même but : faire respecter l’ordre hiérarchique.
Pour le savoir, ils ont créé de petites arènes dans leur laboratoire et y ont placé 311 couples de G.cornutus mâles. Les chercheurs ont laissé chaque paire dans l’arène pendant 20 minutes, en notant les tentatives de séduction et d’agression. A la fin du round, après une pause de 5 minutes, ils ont enlevé un mâle et l’ont amené chez une femelle. Puis, ils les ont observés pendant 20 minutes, enregistrant les tentatives de séduction et d’accouplement.
Image d’entête : deux mâles G.cornutus dans l’arène scientifique (Matthew Silk)
Ils ont constaté que, dans 70 % des cas, les coléoptères mâles appariés convenaient de celui qui serait monté et du “monteur”. Dans ces cas, le SSB a beaucoup moins de chances d’être suivi par un combat. Mais quand le dendroctone du bas ne voulait pas être en bas, ou qu’il essaye de faire un tour sur le dessus, cela donne lieu à de l’agressivité. Fait intéressant, les paires qui se livrent au SSB, même si un seul des deux insectes l’entreprend, étaient beaucoup moins agressives que les couples sans aucun SSB.
Les données ont également montré que les mâles qui tenaient la place de “monteur”, avec d’autres mâles, étaient plus à l’aise avec les coléoptères femelles, les approchant plus souvent et en ayant plus de succès que les mâles montés (et non pas mal monté…).
Selon l’auteure principale, Sarah Lane :
Nos résultats fournissent la première preuve empirique de l’hypothèse que le comportement sexuel de même sexe est une extension de la concurrence mâle-mâle. Ils suggèrent également que le SSB peut agir comme un affichage non préjudiciable, ce qui permet aux mâles de résoudre les hiérarchies de dominance sans dégénérer en un combat dommageable.
Leurs résultats ont été publiés dans la revue Animal Behaviour : Same-sex sexual behaviour as a dominance display.