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Mycocepurus goeldii -Mycocepurus castrator

Une espèce de fourmi parasite, qui vient d’être découverte, apparait avoir bifurqué de sa branche dans l’arbre de l’évolution sans quitter son domicile… Le Guru a tendance à se répéter, avec la vieillesse…

Selon les chercheurs, ce nouveau type de parasite de fourmi ne se trouve dans un seul plant d’eucalyptus sur le campus de l’université d’État de São Paulo au Brésil et sa présence soutient une théorie controversée sur la formation des espèces.

Selon Christian Rabeling, professeur adjoint de biologie à l’université de Rochester (New York) :

La plupart des nouvelles espèces apparaissent dans l’isolement géographique. Nous avons maintenant la preuve que la spéciation peut avoir lieu dans une seule colonie.

En découvrant le parasite Mycocepurus castrator, les chercheurs ont mis à jour un exemple de spéciation sympatrique, qui se produit quand une nouvelle espèce se développe tout en partageant la même zone géographique avec ses espèces parentes.

Rabeling :

Alors que la spéciation sympatrique est plus difficile à prouver, nous pensons que nous sommes en train de documenter un type particulier d’évolution en cours.

De nouvelles espèces se forment lorsque leurs membres ne sont plus capables de se reproduire avec les membres de l’espèce parente. Le mécanisme communément accepté est appelé spéciation allopatrique, où les barrières géographiques, comme des montagnes, séparent les membres d’un groupe, les obligeant à évoluer indépendamment.

Selon Ted Schultz, conservateur au Musée national d’histoire naturelle de la Smithsonian Institution et co-auteur de l’étude :

Depuis l’origine des espèces de Darwin, les biologistes évolutionnistes ont longtemps débattu pour savoir si deux espèces peuvent évoluer d’un ancêtre commun sans être isolées géographiquement les unes des autres. Avec cette étude, nous offrons un argument convaincant pour l’évolution sympatrique qui va engendrer de nouvelles conversations dans le débat sur la spéciation de ces fourmis, des insectes sociaux, et dans la biologie évolutive de façon plus générale.

Le parasite M. castrator n’est pas simplement une autre fourmi dans la colonie; c’est un parasite qui vit avec et hors de son hôte, la Mycocepurus goeldii. L’hôte cultive le champignon pour sa valeur nutritive, à la fois pour lui-même et, indirectement, pour son parasite qui en profite sans rien faire.

Image d’entête à partir de l’étude : deux reines fourmis, à gauche Mycocepurus goeldii (l’hôte) et à droite Mycocepurus castrator (le parasite)

Cela a conduit les chercheurs à étudier les relations génétiques de toutes les fourmis champignonnistes d’Amérique du Sud, y compris cinq déjà connu et six espèces nouvellement découvertes du genre Mycocepurus, afin de déterminer si le parasite avait évolué à partir de son hôte présumé. Ils ont constaté que les fourmis parasites étaient, en effet, génétiquement très proches des M. goeldii, mais pas des autres espèces de fourmis.
Ils ont également déterminé que les fourmis parasites n’étaient plus sexuellement compatibles avec les fourmis hôtes, en faisant une espèce unique, et qu’elles avaient cessé de se reproduire avec leur hôte, il y a à peine 37 000 ans, une très courte période à l’échelle de l’évolution.

Les chercheurs ont découvert un indice important quand ils ont comparé les gènes des fourmis, à la fois dans le noyau de la cellule et dans les mitochondries. Les unités de séquençage de gènes appelés nucléotides dans les mitochondries des fourmis parasites ont commencé à révéler des différences face à leurs fourmis d’accueil, même si des traces de la relation entre l’hôte et le parasite sont toujours présentes dans les gènes des noyaux. Ces résultats ont conduit les biologistes à conclure que le M. castrator a commencé à évoluer loin de son hôte. 

Une simple comparaison des gènes n’est pas suffisante pour démontrer que les fourmis parasites sont une espèce totalement nouvelle, selon Rabeling :

Nous sommes en train de séquencer le génome mitochondrial et nucléaire de ces fourmis parasites et de leur hôte afin de confirmer la spéciation et le mécanisme génétique sous-jacent.

Les fourmis parasites doivent faire preuve de discrétion, car le fait de profiter de l’espèce hôte est plutôt mal vu dans la société des fourmis. Bon nombre des fourmis parasites ont été tuées par des ouvrières légitimes. En conséquence, la reine parasite de la nouvelle espèce a évolué pour devenir plus petite, la rendant plus difficile à distinguer d’une ouvrière de l’hôte.

Les reines et les males se reproduisent lors d’une cérémonie aérienne, dans les régions tropicales humides, pendant la saison des pluies. Les reines et les mâles parasites, qui ont besoin d’être plus discrets sur leurs activités de reproduction, divergent du modèle d’accouplement de l’hôte. Pour cacher leur identité de parasite, les mâles et les femelles M. castrator ont perdu leurs adaptations particulières qui leur permettaient de se reproduire en vol, et s’accouplent désormais dans le nid de l’hôte, ce qui rend impossible d’interagir sexuellement avec l’espèce qu’elles exploitent.

L’étude publiée dans Current Biology : A Social Parasite Evolved Reproductive Isolation from Its Fungus-Growing Ant Host in Sympatry.

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