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ADN-concept

Des généticiens de l’université d’Oxford ont fait une incroyable annonce : que seulement 8,2% de notre ADN aurait une fonction biologiquement importante. Cela signifie que plus de 90% du génome humain serait “inutile”, une découverte qui pourrait considérablement accélérer la recherche en génétique.

Le concept d’ADN poubelle a émergé au début des années 1970. L’idée a pris son essor à la fin du Projet génome humain dans les années 1990, lorsque les chercheurs ont constaté que plus de 98% de notre génome n’avait aucun but apparent. Mais les résultats du projet ENCODE 2012 ont suggéré que 80%, de ce qui a été estimé comme étant de l’ADN poubelle, ou non codant, aurait en fait une sorte de fonction biochimique. Par conséquent, le concept (d’ADN poubelle) a commencé à tomber en désuétude, mais il y a eu une nouvelle poussée scientifique de le voir réaffirmé. Plus tôt cette année, par exemple, les généticiens Alexander Palazzo et T. Ryan Gregory (université de Guelph, Canada) ont démontré, de manière convaincante, de l’inutilité d’une grande partie de notre ADN.

Cette semaine, les généticiens Chris Rands et Chris Pointing de l’université d’Oxford (Medical Research Council’s Functional Genomics Unit) ont poussé cette idée encore plus loin, en affirmant que seulement 8,2% (7,1 à 9,2%) du génome humain aurait un rôle biologique significatif.

Selon eux, la raison de la controverse de l’ADN poubelle, tient dans la définition inappropriée et trop large de ce que l’on entend par “ADN fonctionnel”. Ils font valoir que le simple fait d’une activité sur l’ADN, n’implique pas nécessairement une conséquence.

Ils précisent :

Pour la fonctionnalité vous avez besoin de démontrer qu’une activité importe.
Mais ce n’est pas seulement un argument académique du mot nébuleux “fonction”. Ces définitions sont importantes. Lorsque le génome de patients est séquencé, si notre ADN était largement fonctionnel, nous aurions besoin de prêter attention à chaque mutation. En revanche, avec seulement 8% fonctionnel, nous devons travailler sur les 8% des mutations détectées qui pourraient être importantes. D’un point de vue médical,c’est essentiel à l’interprétation du rôle de la variation génétique humaine dans les maladies.

Pour parvenir à ces conclusions, les chercheurs ont utilisé une approche comparative qui leur a permis de faire la distinction entre les activités qui sont importantes, de celles qui ne le sont pas. Ils ont déterminé la quantité de changements que notre génome a évité d’accumuler durant 100 millions d’années d’évolution, une indication que cet ADN importe et qu’il a une fonction d’une importance cruciale qui doit être retenue. Plus précisément, ils ont comparé les séquences complètes d’ADN de divers mammifères : souris, cochons d’Inde, lapins, chiens, chevaux et humains. Les chercheurs ont étudié les cas d’insertions et de suppressions de morceaux d’ADN apparues dans le génome de mammifères.

Tout au long de l’évolution de ces espèces, à partir de leurs ancêtres communs, les mutations se produisent dans l’ADN et la sélection naturelle neutralise ces changements afin de maintenir les séquences d’ADN utile intactes.

Leurs travaux montrent que les 8,2% varient dans leur importance. À peine 1% de l’ADN humain représente les protéines qui réalisent la quasi-totalité des processus biologiques importants dans le corps (en d’autres termes, 99% du génome humain ne code pas pour des protéines). Les 7% restants sont estimés être impliqués dans le démarrage et l’arrêt des gènes qui codent pour des protéines; ces gènes, qui sont des éléments de contrôle et de régulation, fonctionnent à différents moments en réponse à divers facteurs et dans différentes parties du corps.

Les protéines produites sont pratiquement les mêmes dans chaque cellule de notre corps, de notre naissance à notre mort. Qu’elles sont celles qui sont en fonction, où dans le corps et à quel moment dans le temps, doit être contrôlé et ce sont les 7% qui exécute ce travail.

Il faut pour l’instant prendre ces résultats avec des pincettes. D’expérience, le Guru vous dira qu’il n’est pas dans la nature de l’évolution de s’embêter d’éléments qui ne lui servent à rien et l’équipe de généticien n’est pas tout à fait sure de savoir pourquoi tant de notre ADN est superflu. Selon Chris Pointing, nous pourrions encore survivre après avoir été débarrassés de la plupart de notre information génétique. S’il a raison, et c’est un grand si, nous pourrions théoriquement réduire notre génome de deux milliards de lettres d’ADN à environ 250 millions.

Mais c’est une idée qui est hors de la portée de cette étude. Il est encore fort possible que cet ADN non codant, ou des segments non fonctionnels de celui-ci, ait une sorte de rôle périphérique, mais essentielle pour les fonctions biologiques, comme de séparer spatialement l’ADN actif afin que des réactions biochimiques essentielles puissent se produire. Nous ne savons tout simplement pas ce qui se passerait pour les 10% restants et comment il serait exprimé si nous soustrayons les 90% de notre génome jugé, ici, comme superflu. Il est également important de souligner qu’il s’agissait d’une analyse comparative de mammifères et qu’elle est basée sur des extrapolations de données. Ce débat est donc loin d’être terminé.

L’étude publiée dans PLOS Genetics : 8.2% of the Human Genome Is Constrained: Variation in Rates of Turnover across Functional Element Classes in the Human Lineage.

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