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Le Guru prend parfois plus de temps à trouver le titre de ses articles qu’à les écrire et le résultat n’est pas toujours fameux… Il pense que c’est le cas ici, mais rassurez-vous tout va s’éclaircir.

Lorsque vous vous coupez, vous saignez, puis se forme un caillot, et enfin, si tout se passe bien, c’est la guérison. Mais si vous laissez tomber votre téléphone, dans la plupart des cas, seul le service technique peut vous aider, enfin, si vous êtes chanceux.

De la même manière, nos appareils électroniques pourraient-ils se réparer tout seuls un jour ? Les délicates structures électroniques cachées à l’intérieur pourraient-elles se développer de la même manière que votre squelette s’est lui-même formé, répondant uniquement aux messages de l’environnement chimique dans notre corps ? On s’en rapproche, mais à quel prix…

Les chercheurs du MIT ont réalisé une grande avancée dans la conception de matériaux vivants. Ils ont commencé avec l’E. coli (Escherichia coli), une bactérie qui développe un biofilm qui est appelé “fibres curli". Habituellement, l’E.coli développe ces fibres pour l’aider à se fixer aux surfaces.

Un exemple tiré de Wikipédia : au microscope électronique, E.coli avec (à droite) et sans (à gauche) biofilm (fibres curli).
Biofilm-EColi

Dans ce cas, les scientifiques ont modifié l’E. coli pour produire des fibres curli uniquement quand une molécule spécifique de “déclenchement” est présente. Cela permet aux chercheurs de l’utiliser comme un interrupteur pour démarrer la production de fibres curli ou la désactiver. Ils en ont conçu deux variations : une répondant à un déclencheur appelé AHL et l’autre répondant à un déclencheur désigné Tc.

Selon l’auteur principal de l’ article Timothy Lu , professeur adjoint en génie électrique et génie biologique :

En fin de compte, nous espérons imiter la façon dont les systèmes naturels, comme l’os, se forment. Personne ne dit à l’os quoi faire, mais il génère un matériau en réponse aux signaux environnementaux.

Les bactéries déclenchées par le Tc produisent des fibres curli contenant un acide aminé, l’histidine. Il va naturellement récupérer des nanoparticules d’or dans l’environnement. Les bactéries déclenchées par l’AHL n’ont pas d’histidine. En faisant varier les concentrations d’AHL et de Tc, les scientifiques peuvent créer un biofilm composé de rangées de nanofils d’or, produisant un réseau qui conduit l’électricité.

Image d’entête : Un rendu d’artiste d’une cellule bactérienne conçue pour produire des nanofibres d’amyloïde qui incorporent des particules telles que des points quantiques (sphères rouge et vert ) ou des nanoparticules d’or. (Image : Yan Liang, coauteur de l’étude)

En modifiant certaines bactéries qui produisent les molécules de déclenchement, les scientifiques ont également démontré que “les cellules peuvent se coordonner avec d’autres pour contrôler la composition du biofilm."

Il s’agit d’un premier petit pas vers la création d’un système qui pourrait reconnaitre un manque et réagir pour le réparer/ combler, non pas comme un processus conscient, mais comme une conséquence naturelle pour maintenir l’équilibre dans l’organisme qui est un hybride de cellules et de matériaux artificiels.

Des expériences supplémentaires ont exploré la création de biofilms avec un système mixte de particules d’or et de points quantiques (nanostructure de semi-conducteurs).

Bien sûr, si nous possédons des produits à base d’organismes génétiquement modifiés, nous devrons évaluer et maitriser les risques que ces cellules vivantes artificielles se répandent largement dans notre environnement. En utilisant des bactéries pour la production, mais en ne relâchant que le produit fini (sans organismes vivants à l’intérieur)  serait une première étape un peu plus sûre, en contenant des organismes génétiquement modifiés dans un environnement limité où ils seraient mieux contrôlés. 

…Cela reste inquiétant, mais il faut aussi considérer leur potentiel à être utilisé dans la création de nouvelles batteries pour les cellules solaires, dans l’objectif de remplacer les combustibles fossiles par l’énergie solaire. Les chercheurs s’intéressent également  à enduire le biofilm d’enzymes qui pourraient détruire la cellulose, ce qui pourrait être utile pour convertir les déchets agricoles en biocarburant. Les possibilités sont assez nombreuses et les risques sans doute aussi.

L’étude publiée sur Nature : Synthesis and patterning of tunable multiscale materials with engineered cells.

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