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Guppie-genitalia

Les Guppies (Poecilia reticulata) sont de petits poissons d’eau douce très populaires dans les aquariums du monde entier. Contrairement à de nombreux poissons, où les mâles et les femelles expulsent le sperme et les oeufs dans l’eau environnante, les mâles fécondent les femelles guppy en livrant le sperme directement dans leur corps. Bien évidemment, cela vous rappelle quelque chose, sauf qu’ils n’ont pas de pénis, en tant que tel. Au lieu de cela, ils ont modifié (évolution oblige) une nageoire en un organe pénétrant appelé gonopode.

Cet organe reproducteur est bordé par un ensemble de griffes, de crochets et d’épine. Ces caractéristiques évoluent très rapidement et elles sont parfois le seul moyen de différencier une espèce guppy d’une autre. Il est possible que les griffes aident les mâles à s’accrocher aux femelles, même celles qui ne veulent pas s’accoupler avec eux. Sinon, elles pourraient aider à tenir le sperme à l’extrémité du gonopode, afin qu’ils puissent être plus facilement implantés dans les femelles.

A partir de l’étude (lien plus bas), en entête et au microscope électronique ci-dessous, le gonopode d’un guppy mâle et ses griffes (claws).

gupi-griffe-pénis

Pour tester ces idées, Lucia Kwan de l’Université de Toronto a utilisé un scalpel pour soustraire ces griffes de plusieurs mâles, laissant le reste de leur gonopode intact. Elle n’appelle pas cela raser, mais plutôt de “l’ingénierie phénotypique". Ce n’est pas sans rappeler au Guru, dans un autre sujet de recherche, la découpe au laser des épines du pénis d’un coléoptère et ceci avec le même objectif : déterminer si les mâles avec le pénis rasé étaient aussi performants que ceux ayant la chance d’avoir conservé leurs épines.

Pour ce faire, Lucia Kwan a ensuite placé les mâles individuellement dans des réservoirs avec des femelles célibataires, et elle observa. C’était une expérience assez simple avec un résultat clair. Par rapport aux mâles rasés, ceux disposant de leurs griffes ont transféré trois fois plus de spermatozoïdes dans des femelles non réceptives, mais le même montant dans celles qui autorisaient l’accouplement. Cela suggère fortement que les griffes sont un “trait sexuellement antagoniste", qui bénéficie à un sexe au détriment de l’autre. Dans ce cas, ils aident les mâles à saisir les femelles résistantes.

Il s’agit de la dernière d’une petite, mais croissante suite d’études comportant des rasages génitaux, qui visent à découvrir pourquoi (attention, un étrange pénis d’animal en lien dans chaque prochain mot) les organes sexuels des animaux adoptent des formes si étranges. Un groupe de chercheurs à, par exemple, raser au laser les pointes du pénis d’une mouche pour montrer qu’elles disposent d’une sorte de “velcro biologique”, qui permet aux mâles de s’accrocher aux femelles. Une autre équipe a fait la même chose (déjà cité plus haut), avec le pénis d’un coléoptère pour démontrer que ses terribles piques ne sont pas des ancres, leur rôle semble être de percer le tractus génital de la femelle pour injecter son sperme directement dans son sang.

Le piquant pénis de la bruche :
Les pénis de ces insectes sont tout aussi variés dans la forme, la taille et leur caractère piquant que ceux des guppys, de sorte que ces expériences suggèrent que la bataille des sexes a alimenté l’évolution de ces groupes, en les aidant à se diversifier dans les nombreuses espèces que nous voyons aujourd’hui. Pour comprendre ce processus, les scientifiques ont besoin de comparer les organes de nombreuses espèces différentes, mais ces expériences de rasage d’ingénierie phénotypique sont certainement une bonne première étape.

L’étude publiée sur Biology Letters : Sexual conflict and the function of genitalic claws in guppies.

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