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Toutes les peurs ne sont pas identiques. Une femme qui se marre devant des films d’horreur, attrape des serpents dangereux et qui négocie calmement avec des hommes brandissant des couteaux, sera tout de même terrorisée avec une seule bouffée étouffante de dioxyde de carbone.

Cette femme, que le Guru vous a décrite dans son article : la femme qui ne connait pas la peur, connue sous les initiales de SM, souffre d’une maladie qui a endommagé son amygdale, une structure cérébrale impliquée dans la peur. Mais les nouveaux résultats la concernant, ainsi que deux autres personnes ayant le même problème, publiés en ligne le 3 février (lien plus bas), montrent qu’un certain type de signal de danger peut contourner l’amygdale, en activant la panique dans d’autres parties du cerveau, comme le tronc cérébral, le diencéphale, ou le cortex insulaire, qui peuvent sentir le danger par les signaux internes les plus primaires lorsque la survie est menacée.

Le besoin de respirer est une des exigences les plus fondamentales pour la survie. Le neuropsychologue clinique Justin Feinstein, de l’Université de l’Iowa, à Iowa City, estime que l’instinct pour la prise d’air pourrait puiser dans un système du cerveau qui est plus primaire que l’amygdale.

Feinstein et ses collègues travaillent avec SM et d’autres patients qui souffrent d’une maladie génétique rare, appelée maladie d’Urbach-Wiethe. A la fin de l’enfance, cette maladie peut détruire l’amygdale, une paire de structures en forme d’amande située profondément dans le cerveau. SM ne montre aucune peur lorsqu’elle est confrontée à des maisons hantées, des araignées et des films d’épouvante. Maintenant, les scientifiques ont découvert quelque chose qui lui fait peur.

Une bouffée d’un gaz composé de 35 % de dioxyde de carbone (l’air normal contient moins de 1 % de dioxyde de carbone) et cela peut immédiatement provoquer une forte peur panique. Lorsque le gaz atteint le corps, des protéines spécialisées détectent que quelque chose ne va pas et envoient un message du type “besoin d’air, c’est urgent !” au cerveau.
"C’est automatique”, explique Feinstein, qui s’est soumis lui-même à la procédure plusieurs fois :

Les alarmes de votre corps se mettent en branle dès les 10 premières secondes.

Une étude récente, utilisant des souris, a montré que l’amygdale détecte le dioxyde de carbone et contribue à produire un comportement similaire à la peur. Ainsi, les chercheurs pensaient que SM et les deux autres femmes de l’étude pourraient également montrer une faible réponse au gaz. Mais ils se sont trompés. La réaction de SM au gaz a été rapide et sans équivoque, elle avait peur. Elle a immédiatement commencé à haleter en agitant frénétiquement la main. Quatorze secondes après avoir inhalé le gaz, elle a crié à l’aide. Ses yeux s’ouvrirent largement, ses narines et son visage rougirent. Plus tard, elle a dit qu’elle avait ressenti de la panique. Quand un chercheur lui a demandé si elle avait été surprise par sa réaction, elle répondit :

je l’étais, parce que rien ne se passe habituellement pour moi.

Les chercheurs était également stupéfait, selon Feinstein :

Ce fut une surprise totale pour nous tous. Nous avons étudié son cas pendant une longue période et nous n’avions jamais assisté à une réaction de ce genre.

Les deux autres bénévoles ont réagi de la même façon, en présentant également des signes de paniques en réponse au dioxyde de carbone et les deux exprimant leur surprise face à la sensation qu’elles n’avaient jamais connu auparavant.

C’était très frappant. Vous avez affaire à des gens qui ont passé la majeure partie de leur vie sans crainte.

Lorsque les chercheurs ont testé 12 volontaires sains, le dioxyde de carbone a suscité des attaques de panique chez seulement trois d’entre eux. Les réactions exagérées des femmes (les 3 cobayes qui ne connaissaient pas la peur !!) suggèrent que le rôle habituel de l’amygdale, dans la panique, est d’arrêter une réponse qui commence quelque part ailleurs.

Cette étude s’ajoute à un nombre croissant de travaux montrant qu’il existe différents systèmes pour les réponses aux différents types de menaces. Mais pour les scientifiques le rôle de l’amygdale dans l’émotion de la peur est encore loin d’être claire. Il est très difficile de lier une région du cerveau à une émotion particulière, surtout lorsque la majeure partie des recherches sur le sujet sont effectuées sur des animaux.

L’étude publiée sur Nature neuroscience : Fear and panic in humans with bilateral amygdala damage.

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