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Icerya_purchasi

La vie de la Cochenille australienne (Icerya purchasi, en photo ci-dessus) pourrait appartenir aux lignes du plus ridicule des tabloïdes. Papa laisse des parties de corps parasites dans sa propre fille, qui produisent le sperme qui féconde ses œufs. Il est à la fois père et grand-père de ses propres petits-enfants.

En plus de cela, ces insectes sont le plus souvent hermaphrodites. À l’exception du pur mâle, presque tous les individus sont à la fois mâles et femelles. Ils se reproduisent en ayant des relations sexuelles avec eux-mêmes, fertilisent leurs propres oeufs avec leur propre sperme. Et cela signifie que ces cochenilles peuvent être père, mère, grand-père et grand-mère de l’ensemble de leurs petits-enfants.

Les cochenilles sont de petits animaux qui sucent la sève des plantes pour vivre. Enrobés d’une armure cotonneuse, la plupart des gens ne sauraient même pas les reconnaitre comme des insectes. Elle et deux de ses proches parents sont les seules hermaphrodites connus dans plusieurs millions d’espèces d’insectes.

Dans la plupart des animaux hermaphrodites, un individu grandit et développe des organes qui font à la fois du sperme et des oeufs. Mais ce n’est pas le cas pour cette cochenille australienne. Quand elle s’accouple avec elle-même, elle fertilise ses oeufs avec son propre sperme. Puis, après le point de la conception, le sperme envahit encore plus l’embryon. Ce «tissu infectieux» crée des organes producteurs de sperme à l’intérieur de la fille* et le sperme en résultant, fertilise éventuellement les œufs de celle-ci.

* Une note sur la terminologie: de toute évidence, chaque insecte est hermaphrodite, mais ils sont dénommées «filles» parce qu’ils ont le corps d’une femelle, les purs et rares mâles sont d’un aspect très différent.

Comment ce système sexuel bizarre a t’il évolué ? En 2009, Benjamin Normark a suggéré que c’était le résultat d’une guerre des sexes. Il a envisagé un temps où les mâles et les femelles étaient des entités séparées. Lorsque les mâles ont gagné la capacité d’infecter leurs filles avec du sperme «parasites», ils pouvaient féconder les œufs de plusieurs générations. Ce trait s’est propagé, jusqu’à ce que le tissu parasitaire soit devenu la norme et les vrais mâles ont presque tous disparu.

Normark a supposé que le sperme infectieux serait parasitaire, qu’il bénéficierait toujours de la lignée masculine au détriment de la santé des filles ou de leur capacité de reproduction. C’est une hypothèse raisonnable, étant donné les conflits sexuels qui font rage chez d’autres insectes, de nombreuses espèces produisent des spermatozoïdes femelles qui blessent, voire raccourcisse leur vie.

Mais Andy Gardner et Laura Ross de l’Université d’Oxford pense qu’il y a plus dans l’évolution de la vie sexuelle la cochenille qu’un conflit mâle-femelle. Ils ont développé un modèle mathématique pour simuler ces conflits sexuels chez les anciennes cochenilles où les sexes étaient toujours distincts. Le modèle tient compte du fait que les filles ne sont pas infectées par d’anciens tissus parasites, ils proviennent de leur «père», et transportent les mêmes nombreux gènes qu’elles ont. Ainsi, il y a un avantage pour eux de coopérer, plutôt que de se concurrencer.

Leur modèle prédit que lorsque cette tactique bizarre a d’abord évolué, les tissus infectieux auraient probablement nui aux femelles d’une certaine façon, qui se seraient adaptés pour les supprimer. En fait, si les préjudices avaient été assez élevés, les tissus infectieux auraient probablement évolué pour se supprimer, ses gènes auraient eu une meilleure chance d’atteindre la prochaine génération s’ils laissent la fille faire les choses d’elle-même et de s’accoupler avec un vrai mâle.

Au fil du temps, ce conflit se serait affaibli. Les tissus infectieux seraient devenus plus communs et moins de dommage aurait été infligé à la femelle. Finalement, les filles pourraient en bénéficier, étant fécondées par le sperme de papa.

À un certain moment, il y aurait eu un point de basculement, lorsque le conflit a fait place à la collaboration. Les femelles transmettraient plus de leurs propres gènes à la génération suivante, si elles s’accouplent avec leurs propres pères parasitaires, plutôt que les autres mâles. Les Mâles normaux ont commencé à disparaitre et les hermaphrodites prirent le relais. Plutôt qu’existant comme un sexe distinct, les mâles se sont transformés en une lignée de tissus parasitaires, transmise d’une fille à l’autre.

Il y a une touche finale à ce conte: Gardner et Ross pensent que les cochenilles transportent un passager qui pourrait avoir accéléré la disparition des mâles, une bactérie. Beaucoup d’insectes portent des bactéries utiles qui leur fournissent des nutriments importants et la cochenille australienne n’est pas différente. Ces bactéries peuvent souvent être trouvées en grappes serrées autour des tissus infectieux et s’ils sont tués par des antibiotiques, les femelles sont plus susceptibles de produire des fils.

Pour Gardner et Ross, cela suggère que la bactérie pourrait aider à protéger les tissus infectieux d’être détruit. Pourquoi ? Parce que les bactéries sont transmises de mère en fille. Les mâles sont une impasse pour eux. À cet égard, leurs "intérêts" sont les mêmes que celles du tissu infectieux. Les fils sont dans une impasse; les filles fournissent des navires qui naviguent dans la prochaine génération.

Référence: Gardner & Ross. 2011. L’évolution de l’hermaphrodisme par une lignée cellulaire dérivée de mâles infectieux.

Sur le site de l’université d’Oxford : Insect ‘incest’ signals an end to males.

 

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