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Que se passe-t-il lorsque vous jeter 8 000 fourmis de feu à l’eau ? Nathan Mlot de l’institut des technologies Georgia (Georgia Tech, Atlanta Etats-Unis) a voulu le savoir. Nathan a déposé les fourmis dans un bécher, il les a fait tourbillonner pour les rouler en boule et les a laissé décanter dans un bac rempli à moitié d’eau. Vidéo explicative en anglais plus bas.

Meurtrier sadique me direz vous, mais au cours des trois minutes suivantes, la boule de fourmis s’est lentement élargie et aplati en un radeau vivant imperméable à l’eau. Par la formation de bulles d’air piégées entre l’emboitement de leurs organes, les fourmis ont augmenté leur capacité naturelle à repousser l’eau et se sont maintenues à flot. Vous pouvez consulter ma description anatomique de la fourmi sur un air mexicain.

Les humains construisent des radeaux en attachant ensemble des planches de bois ou de roseaux, les fourmis de feu le font en se tenant les unes les autres.

En milieu naturel :

fourmis-radeau2L’expérience peut paraitre étrange, mais elle reflète les conditions auxquelles la fourmi de feu (Solenopsis invicta) est régulièrement exposée dans son environnement naturel. La fourmi est originaire des plaines de l’Argentine, où la montée des eaux submerge régulièrement leurs nids. Ils s’y adaptent en tissant leur propre corps en radeaux. Les fourmis se réunissent également pour construire des ponts, des échelles et des murs, mais les radeaux ont la plus longue durée de vie de toutes ces structures. Sous cette forme, ils peuvent flotter et naviguer pendant des mois.

L’expérience :

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Pour voir comment ces radeaux se sont formés, Mlot a placé des boules de 1000 à 8000 fourmis dans l’eau. Ils se sont comportés comme une goutte de fluide qui se propage. Il n’a fallu que quelques minutes, pour que même les plus grandes colonies se réorganisent en un radeau en forme de crêpe, une diffusion vers l’extérieur, comme une goutte de colorant le ferait.

La taille du radeau est finement calibrée. Si Mlot enlevait les fourmis de la couche supérieure, ceux qui sont sur le fond se proposent de les remplacer, en gardant le radeau à une épaisseur constante. En fait, cette bousculade entre les fourmis, sur la couche supérieure et inférieure, détermine la vitesse à laquelle pousse le radeau et sa taille définitive. Les fourmis sur le dessus sont libres de se promener et elles rebondissent sur les bords jusqu’à ce qu’elles en attrapent un. Les fourmis sur la couche inférieure sont épinglées par leurs congénères qui les entourent, les tenant vers le bas avec les mâchoires et les griffes et ceux qui marchent au-dessus d’eux, en photo ci-dessous.

Images ci-dessous de la gauche vers la droite : sous un Microscope à électron, une fourmi qui attrapent à l’aide de ces mandibules, la patte d’une autre fourmi. Image du milieu, au microscope deux pattes de fourmis agrippées par leurs griffes. Image de droite similaire à la seconde sans microscope.

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Comment ne pas sombrer ?

Même si les fourmis sont plus denses que l’eau, les individus peuvent se tenir dessus, grâce à la tension de surface (ou tension superficielle), la propriété qui fait se comporter la surface d’un liquide comme une feuille élastique. Mais cette tension superficielle ne peut que soutenir de petits objets. Les pieds d’une fourmi ne posent pas de problème, mais il est plus difficile de concevoir comment une boule de milliers de fourmis se tordant, pourrait ne pas sombrer.

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Les fourmis sont recouvertes d’une couche cireuse qui repousse l’eau. Si vous mettez une goutte sur la tête d’une fourmi, elle reste là, comme une perle, plutôt que de s’aplatir et de recouvrir l’insecte.
Image ci-contre : l’Exosquelette de la fourmi est naturellement légèrement hydrophobe.

En fait, les surfaces les plus rugueuses sont meilleures pour repousser l’eau que celles douces, car elles emprisonnent plus de poches d’air entre la surface et l’eau. Ensemble, un groupe de fourmis forme une surface plus rugueuse que n’importe quel individu. Par leur puissance combinée, le radeau de fourmis repousse l’eau encore plus efficacement qu’une seule fourmi.

Vidéo, test de résistance :

La vidéo qui explique tout :

La surface de la feuille de lotus, est une autre structure naturelle qui excelle à repousser l’eau. Elle est trop rude et parsemée de petites bosses. Mais la feuille est une surface unique, “d’un seul bloc”, les fourmis, par comparaison, s’assemblent sur une surface similaire en liant leur propre corps.

Par la formation de bulles autour et entre leurs organes, les fourmis veillent aussi à ce qu’elles puissent respirer et flotter. Même si le radeau est poussé vers le bas avec un bâton, il refuse toujours de couler. Les fourmis "cabossent" l’eau, mais ils n’iront pas en dessous.

Le radeau est un miracle de l’ingénierie biologique. Il se construit en quelques minutes, sans équipement, ils flottent, repoussent l’eau et il peut contenir des millions de passagers avec zéro mort. Mlot est intéressé à reproduire ces caractéristiques avec des robots.

L’extrait de l’étude approuvée le 31 mars : Fire ants self-assemble into waterproof rafts to survive floods.

Et pour tous les détails, sur le site ant lab du co-auteur de l’étude Nathan Mlot : How do ants survive food ?

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